Sur les hauts de Cologny, surplombant la rade de Genève, la Fondation Martin Bodmer constitue l’un des fleurons culturels du canton. La collection réunie par Martin Bodmer, issu d’une famille protestante zurichoise, vient d’être classée par l’UNESCO au programme «Mémoire du monde». Riche de quelque 150’000 manuscrits, livres imprimés, gravures, pièces archéologiques, elle reflète 3000 ans de civilisation, et a désormais acquis son statut de «Bibliothèque de la littérature mondiale».
Outre son esprit de collectionneur, Martin Bodmer a occupé le poste de vice-président de la Croix-Rouge. Il avait alors acquis sa propriété de Cologny pour y vivre et y abriter sa collection. L’architecte Mario Botta a réalisé des travaux en sous-sol et créé des espaces d’exposition, adapté à la conservation des œuvres anciennes. Au premier niveau l’exposition permanente, où figure notamment la première Bible en allemand de Luther avec des gravures couleur de Cranach (1522). Autres trésors: «Le meilleur exemplaire des Thèses de Luther», indique Jacques Berchtold, directeur des lieux. Ce document datant de 1517 se trouve actuellement exposé au Château d’Augsbourg. «Martin Bodmer a réuni sa collection entre 1916 et 1971», poursuit le directeur de la Fondation. «Il était certes d’un milieu protestant, mais s’est montré un collectionneur sur le modèle de Goethe, c’est-à-dire passionné par toutes les formes d’œuvres en provenance de cultures différentes».
On y trouve donc les Livres des Morts égyptiens, un grand fond de l’Eglise Byzantine. Dans cette tentative encyclopédique de réunion des savoirs, Martin Bodmer avait également réuni des documents exceptionnels du bouddhisme, devant lesquels le dalaï-lama en personne est venu se recueillir, des versions originales des premiers Corans... Des premières éditions, de manuscrits de Shakespeare, de Molière, de Goethe…
Au sous-sol, des expositions temporaires permettent de jeter un regard plus thématique et contemporain sur certains grands auteurs. La dernière en date, «Frankenstein créé des ténèbres», a mis en perspective l’un des mythes de la littérature occidentale, à quelques dizaines de mètres seulement du lieu qui l’a vu naître: la Villa Diodatti, demeure de Mary Shelley et Lord Byron.
Des chefs d’œuvre non pas oubliés, mais que s’emploie à faire revivre la Fondation Bodmer en se dotant d’un centre de numérisation performant et qui permet aujourd’hui de mémoriser et de sauver à tout jamais des trésors de l’humanité.