Les réformés seront-ils bientôt enterrés par les évangéliques ?

JEUNESSE
Cultes animés et importante vie communautaire, les Eglises évangéliques ont le vent en poupe, alors que les Eglises réformées voient leurs effectifs fondre.
CC (by) Joe Shlabotnik
La "Mega-Church" de Solid Rock dans l'Ohio aux Etats-Unis draine des milliers de fidèles
Joël Burri
En Suisse romande, les deux principales dénominations du protestantisme sont les réformés et les évangéliques. La première étiquette regroupe les Eglises protestantes historiques des différents cantons. Multitudinistes, elles reconnaissent comme membres tous ceux qui se reconnaissent comme tels. Pour les réformés les textes bibliques doivent être interprétés en tenant compte du contexte dans lequel ils ont été écrits. Les évangéliques forment quant à eux des congrégations soudées et basent leur foi sur une lecture plus stricte des Ecritures. Les évangéliques et leurs cultes festifs gagnent du terrain sur les réformés, leurs traditions poussiéreuses et leur théologie intello. Un mouvement inéluctable? «Je crois qu’il y a un dynamisme évangélique. Mais je suis prudent avant de pousser la courbe de croissance à l’infini», répond Jean-François Mayer, historien des religions et fondateur du Religioscope. «Même si dans les églises réformées, les fidèles sont moins nombreux au culte le dimanche, il reste toujours des gens attachés à cette identité.» Quant à la croissance rapide de certaines communautés évangéliques, l’historien l’attribue en partie à la circulation intraévangélique. Pour le sociologue des religions, Philippe Gonzalez, il faut aussi noter un mouvement «d’évangéliques qui rejoignent les réformés, soit parce qu’ils sont accidentés de la vie, divorcés par exemple, soit parce qu’ils souffrent de la méfiance envers les intellectuels qui subsiste dans certaines communautés évangéliques.» Les deux chercheurs s’accordent à penser qu’à terme la proportion de réformés devrait se stabiliser autour des 5 à 15%. «Un nouvel équilibre est à trouver», note Philippe Gonzalez. «Jusqu’à présent, les réformés faisaient un travail de diffusion des valeurs protestantes dans la société. Aux réformés la culture, aux évangéliques la conviction. Ce travail de fond n’étant plus assuré, les évangéliques se réapproprient les paramètres de l’identité chrétienne de la nation, alors que les réformés s’inspirent des Eglises évangéliques et de leur vie communautaire.»