La spiritualité protestante incite à la rencontre de l'autre

ACTUEL
En valorisant une spiritualité de la relation, les protestants s’écartent de la spiritualité moderne qui devient une technique de bien-être individuel.
@Monkey Business Images / Shutterstock
Le protestantisme, une affaire de partage et de rencontres
Gilles Bourquin
La spiritualité protestante est le geste par lequel les chrétiens reçoivent et transmettent un don qu'ils ne sauraient produire par eux-mêmes. Elle est éminemment relationnelle. Son accord majeur est celui de la confiance. Pour les protestants, la spiritualité n’est pas un bien propre, une qualité personnelle comme elle tend à le devenir dans la mentalité actuelle. La spiritualité est souvent perçue aujourd’hui comme un ensemble de techniques de sagesse dont l’individu se sert pour son propre développement, hors d’une communauté et sans rapport avec Dieu. Cette spiritualité sans relations devient une vertu privée et laïque. Elle ne correspond plus entièrement aux valeurs des protestants. A leurs yeux, l’homme ne parvient pas à atteindre par lui-même un degré de spiritualité qui soit digne de Dieu. Seule la grâce nous y conduit. Dès ses origines, le protestantisme a cherché à articuler l’annonce de la grâce, qui résulte de l’amour sans conditions que Dieu leur adresse, et l’exigence de la sainteté. D’un côté le pardon divin les libère de la culpabilité, de l’autre l’éthique chrétienne permet la vie sociale. Martin Luther pensait que l’annonce de la grâce allait rapprocher les croyants si intensément de Dieu que l’Eglise n’aurait plus à enseigner une éthique de vie. Il était sans doute trop optimiste sur ce point. Complétant les vues de Luther, Jean Calvin affirma fortement la valeur de la vie spirituelle et de l’éthique chrétienne. Il les associait à une bénédiction à la fois spirituelle et matérielle de la société. A ses yeux, la spiritualité intime, le culte dominical, la vie sociale et le développement économique étaient indissociables. D’un point de vue protestant, la spiritualité consiste donc à recevoir la vie comme un don de Dieu et à chercher à vivre comme Dieu le souhaite dans toutes les situations. Elle ne se limite pas à la vie religieuse. La grâce qui fortifie les fidèles, les encourage et les corrige parfois, les envoie également vers le prochain, vers l’Eglise et vers la société.